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Le choix de Juliette, de Juliette Jourdan

 

« Existrans » oblige, j’ai eu envie de vous présenter un livre sur le thème trans, partiellement autobiographique, où l’auteure nous livre un morceau de sa jeunesse, de son année de licence.

Juliette a vingt ans et vit à Tours, capitale transsexuelle, transgenre, spécifiquement MtF (Male to Female). Sa vie d’étudiante est comparable à celle d’une étudiante lambda : elle vit en coloc avec une copine, fait les boutiques avec sa mère, flirte, travaille pour payer ses études et son loyer, fait la fête, prépare son mémoire de licence... Oui, elle semble vivre une vie d’étudiante banale, et sa coloc, Zaza, prépare un colloque international sur la trans-identité. Elle doit expliquer à sa mère qu’elle doit plutôt porter des soutiens-gorge rembourrés. Elle flirte avec des hommes plus âgés, des trans et des putes, et pour survivre, elle danse la nuit en tenue sexy à l’Angle Rose, club glauque du milieu trans. Juliette fait la fête avec des chaussures à talons spéciales grands pieds et n’a pas écrit un seul mot de son mémoire à une semaine de l’échéance... Mises à part ces petites originalités notables, inhérentes au caractère et au milieu trans dans lequel Juliette est amenée à évoluer, elle est « normale ».

C’est avec sincérité et sensibilité que l’auteure nous raconte sa vie, en partie fictionnée, rappelons-le, et témoigne du parcours chaotique de n’importe quel(le) adolescent(e). Quêtes identitaire, sexuelle, doutes, angoisses, prises de risques, pulsions de mort, solitude, désespoir… Amour en somme… Dans le quartier historique à la fois convivial et dangereux du vieux Tours, les trans cohabitent avec les punks, les drogués, les putes, et le commun des mortels. Cette peinture colorée du milieu marginal dont on a l’impression qu’il est en fait prédominant car central dans l’œuvre, est fidèle à la réalité. Loin des clichés et de la prévisibilité des discours militants, l’auteure dessine des femmes qui n’ont d’artificiel que leur sexe physique, de simples êtres humains en quête de bonheur et en lutte contre leurs propres maux.

Le Choix de Juliette rend un portrait véridique d’une communauté méconnue, mal jugée, en progression vers son égalité. Ce qui m’a le plus touché, c’est la solitude de Juliette. Quand un sexe inchangé se sent seul, il a toujours pour compagnon son reflet plus ou moins constant dans le miroir, éternel ami/ennemi. Quand un nouveau sexe se sent seul, il a aussi perdu ce reflet rassurant. C’est un deuil. Mais tout un chacun ne porte-t-il pas le deuil d’un masque, personnage social multiple sans cesse renouvelé ?

Ce qui m’a également frappé, c’est l’émouvante solidarité au sein de cette communauté trans. Ce monde n’est pas toujours rose, et les rivalités, jalousies et autres bassesses pullulent parmi les divas. Mais l’entraide des filles compense cette solitude à outrance, et la transcende même. Pour conclure, j’emprunterai les mots de la poétesse Zénaïde pour vous offrir un beau conseil : « On est toute seule dans sa peau […]. Sage ou folle, on est seule. Sois folle, va. » Et le poète que je suis ajoutera : « Par ces temps de pluie, sortez couverts ».

Vincent Cheikh



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